ANTONIO GHISLANZONI, CAMILLE DU LOCLE, CHARLES NUITTER / GIUSEPPE VERDI OperaGlass Libretto
Aida
ACTE I | II | III | IV
Notes on the Text
                                AIDA

                        OPERA IN QUATTRO ATTI
                             {VERSI} DI                                  {*}
                         ANTONIO GHISLANZONI
                              MUSICA DI
                            GIUSEPPE VERDI

                             PERSONAGGI

Il Re   .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Basso

Amneris, sua figlia .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Mezzo-sopr.

Aida, schiava etiope   .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Soprano

Radamès, capitano delle Guardie .  .  .  .  .  .  .  Tenore

Ramfis, capo dei sacerdoti   .  .  .  .  .  .  .  .  Basso

Amonasro, re d'Etiopia, padre di Aida .  .  .  .  .  Baritono

Un Messaggero .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Tenore

Sacerdoti, Sacerdotesse, Ministri, Soldati, Capitani.                    {*}
     Funzionari, Schiavi e Prigionieri Etiopi, Popolo
     egizio, ecc. ecc.

L'azione ha luogo a Memfi e a Tebe all'epoca della potenza
     dei Faraoni. 
                                AÏDA

                        OPERA IN QUATRE ACTES
                        PAROLES FRANÇAISES DE
                      C. DU LOCLE & CH. NUITTER
                              MUSIQUE DE
                               G. VERDI

                             DISTRIBUTION

Le Roi  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Basse

Amneris, fille du roi  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Mezzo-sopr.

Aïda, esclave éthiopienne .  .  .  .  .  .  .  .  .  Soprano

Radamès .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Ténor

Ramphis .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Basse

Amonasro, père d'Aïda  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Baryton

Un Messager   .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  Ténor





          L'action se passe à Memphis et à Thèbes à l'époque
                    de la puissance des Pharaons.	
                             ATTO PRIMO

                             SCENA PRIMA

                   Sala nel palazzo del Re a Menfi.

   A destra e a sinistra  una colonnata  con statue e arbusti in
   fiori. — Grande porta nel fondo, da cui appariscono i tempii,
   i palazzi di Menfi e le Piramidi.

                          Radamès — Ramfis.

RAM.    Sì: corre voce che l'Etiope ardisca
        Sfidarci ancora, e del Nilo la valle
        E Tebe minacciar — Fra breve un messo
        Recherà il ver.

RAD.                    La sacra
        Iside consultasti?

RAM.                       Ella ha nomato                                  5
        Delle Egizie falangi
        Il condottier supremo.

RAD.                           Oh lui felice!

RAM. [con intenzione, fissando Radamès]
        Giovane e prode è desso — Ora, del Nume
        Reco i decreti al Re.                              [esce]

RAD. solo                     Se quel guerriero
        Io fossi! se il mio sogno
        Si avverasse!… Un esercito di prodi                               10
        Da me guidato… e la vittoria — e il plauso
        Di Menfi tutta! — E a te, mia dolce Aida,
        Tornar di lauri cinto…
        Dirti: per te ho pugnato e per te ho vinto!
        Celeste Aida, forma divina,                                       15
        Mistico serto di luce e fior;
        Del mio pensiero tu sei regina,
        Tu di mia vita sei lo splendor.
        Il tuo bel cielo vorrei ridarti,
        Le dolci brezze del patrio suol,                                  20
        Un regal serto sul crin posarti,
        Ergerti un trono vicino al sol. 

                            ACTE PREMIER

                           SCÈNE PREMIÈRE

                Salle dans le palais du roi, à Memphis.

A droite et à gauche s'étendent d'immenses colonnades, au milieu desquelles
se dressent les statues des dieux. — Au fond, à travers de vastes pylônes,
on aperçoit les temples, les palais de Memphis et les Pyramides.

                      Ramphis entre suivi de Radamès

RAM.    Oui, l'on prétend que l'Éthiopie entière
        Sur les rives du Nil ose porter la guerre
        Thèbes est menacée! — Avant peu, je saurai
                Si ce qu'on dit est vrai.

RAD.    Avez-vous consulté les dieux?

RAM.                               C'est Isis même
        Qui de nos défenseurs nomma le chef suprême.

RAD.    Ah! quelle gloire!…

RAM. [regardant fixement Radamès]
                          Il est jeune! il est valeureux!
        Je vais porter au roi l'arrête des cieux!       [il sort]

RAD.    Si j'étais ce soldat! O sort auquel j'aspire!
                Si je povais conduire
                Au combat nos guerriers!
        Être vainqueur! rentre à Memphis dans ma gloire,
        A toi, chère Aïda, consacrer mes lauriers…
        Disant: «Tu m'inspira! je te dois la victoire!»
           O céleste Aïda! toi dont la grâce
                  Que rien n'efface
                  Sait tout charmer,
             A toi mon âme est enchaînée,
                  Ma destinée
                  Est de t'aimer!
                  Qu'Isis m'entende,
                  Que je te rende
             Ton beau pays, tes jours heureux.
                  Que je te donne
                  Une couronne,
             Un sceptre d'or digne des dieux!

                           Amneris e detto.

AMN.    Quale insolita fiamma                                            {*}
        Nel tuo sguardo! Di quale
        Nobil fierezza ti balena il volto!
        Degna di invidia oh! quanto
        Saria la donna il cui bramato aspetto                              5
        Tanta luce di gaudio in te destasse!

RAD.    D'un sogno avventuroso
        Si beava il mio cuore — Oggi, la Diva
        Profferse il nome del guerrier che al campo
        Le schiere egizie condurrà… S'io fossi                            10
        A tale onor prescelto…

AMN.    Nè un altro sogno mai
        Più gentil… più soave…
        Al cuore ti parlò?… Non hai tu in Menfi
        Desiderii… speranze?…

RAD.                          Io?… (quale inchiesta!)                     15
        (Forse… l'arcano amore
        Scoprì che m'arde in core…
        Della sua schiava il nome
        Mi lesse nel pensier!)

AMN.    (Oh! guai se un altro amore                                       20
        Ardesse a lui nel core!…
        Guai se il mio sguardo penetra
        Questo fatal mister!)  

                           Radamès — Amneris

AMN.    Dans tes regards quelle ivresse nouvelle!
        Quelle noble fierté sur ton front étincelle!
                   Combien serait heureux
                   Le destin d'une femme,
                   Dont l'aspect dans tes yeux
        Saurait faire briller tant de joie et de flamme.

RAD.    D'un vain rêve le charme avait séduit mon âme
        Isis a désigné le chef que nos soldats
        Pour triompher, bientôt, suivront dans les combats!…
        Ah! quel honneur!… si j'y pouvais prétendre!…


AMN.    Quelque autre rêve encore et plus doux et plus tendre
                   Ne te charme-t-il pas?…
        N'as-tu donc pas de désirs… d'espérance?…

RAD. [à part] O dieux! quelle souffrance!
              Que dit-elle?… malheur!…
              Malheur! si de mon âme
              Elle a surpri la flamme,
              Oui, c'est une autre femme,
              Qui règne dans mon c½ur!

AMN. [à part] Malheur! si dans son âme
              S'allume une autre flamme!
              Si j'ai pu lire dans son c½ur
              Sur eux trois fois malheur!  

                            Aida e detti.

RAD. [vedendo Aida]            Dessa!

AMN.       (Ei si turba… e quale
           Sguardo rivolse a lei!
           Aida!… a me rivale…
           Forse saria costei?)
                        [dopo breve silenzio, volgendosi ad Aida]
           Vieni, o diletta, appressati…                                   5
           Schiava non sei nè ancella
           Qui dove in dolce fascino
           Io ti chiamai sorella…
           Piangi?…  delle tue lacrime
           Svela il segreto a me.                                         10

AIDA       Ohimè! di guerra fremere
           L'atroce grido io sento…
           Per la infelice patria,
           Per me… per voi pavento.

AMN.       Favelli il ver? né s'agita                                     15
           Più grave cura in te?
    [Aida abbassa gli occhi e cerca dissimulare il proprio
     turbamente]
AMN. [guardando Aida]
           (Trema, o rea schiava, ah! trema
           Ch'io nel tuo cor discenda!…
           Trema che il ver m'apprenda
           Quel pianto e quel rossor!)                                    20

AIDA       (No, sull'afflitta patria                                     {*}
           Non geme il cor soltanto;
           Quello ch'io verso è  pianto
           Di sventurato amor).

RAD. [guardando Amneris]
           (Nel volto a lei balena                                        25
           Lo sdegno ed il sospetto…
           Guai se l'arcano affetto
           A noi leggesse in cor!)

                            Les Mêmes, Aïda. 

RAD. [apercevant Aïda]  Elle!

AMN.  [l'observant] Il se trouble! et, le front pâle,
             Comme il la regarde! Aïda!
                    Peut-être ma rivale,
                    C'est elle!… la voilà?
                                      [Haut, s'approchant d'Aïda]
             Viens! Aïda! viens sans effroi!
             Tu n'es pas ma captive.
             Parle! d'où viens que je te voi
             Auprès de moi craintive?
             Tu pleures!… dis-moi tes secrets:
             Dis-moi d'où naissent tes regrets?

AÏDA         Hélas! déjà l'heure a sonné!…
             Un peuple armé s'assemble.
             Pour mon pays infortuné,
             Pour moi, pour vous, je tremble.

AMN.         Ne cache rien! n'est-il pour toi
             D'autre sujet d'effroi?…
     [Aïda baissant les yeux, cherche a dissimuler son trouble.]

RAD. [à part, regardant Amneris]
               Je crains d'une âme altière
               La haine et la colère,
               Si ce profond mystère
               Doit paraître au grand jour!

AMN. [à part, regardant Aïda]
               Tremble, c½ur faux et traître!
               Que mon ½il ne pénètre
               Un secret qui peut-être
               Va paraître au grand jour!

AÏDA [à part]  Oh! non! non! la patrie
               N'est pas seule chérie
               Dans mon âme meurtrie
               Par un fatal amour!

   Il Re, preceduto dalle sue guardie e seguito da Ramfis, dai
     Ministri, Sacerdoti, Capitani, ecc. ecc. Un uffiziale di
     Palazzo, indi un Messaggiero.

IL RE   Alta cagion vi aduna,
        O fidi Egizii, al vostro Re d'intorno.
        Dal confin d'Etiópia un Messaggiero
        Dianzi giungea — gravi novelle ei reca…
        Vi piaccia udirlo…
                [ad un Uffiziale]
                            Il Messaggier si avanzi!                       5

MESS.   Il sacro suolo dell'Egitto è invaso
        Dai barbari Etiópi — i nostri campi
        Fur devastati… arse le messi… e baldi
        Della facil vittoria, i predatori
        Già marciano su Tebe…

TUTTI                          Ed osan tanto!                             10

MESS.   Un guerriero indomabile, feroce,
        Li conduce — Amonasro.

TUTTI                           Il Re!

AIDA                                   (Mio padre!)

MESS.   Già Tebe è in armi e dalle cento porte
        Sul barbaro invasore
        Proromperà, guerra recando e morte.                               15

IL RE   Sì: guerra e morte il nostro grido sia.

TUTTI   Guerra! guerra!

IL RE                   Tremenda, inesorata…                             {*}
                [accostandosi a Radamès]
        Iside venerata
        Di nostre schiere invitte
        Già designava il condottier supremo.                              20
        Radamès.

TUTTI            Radamès!

RAD.                      Sien grazie ai Numi!
        I miei voti fur paghi.                                           {*}

AMN.                           (Ei duce!)       

AIDA                                      (Io tremo).

IL RE   Or, di Vulcano al tempio
        Muovi, o guerrier — Le sacre
        Armi ti cingi e alla vittoria vola.                               25

        Su! del Nilo al sacro lido                                       {*}
        Accorrete, Egizii eroi;
        Da ogni cor prorompa il grido,
        Guerra e morte allo stranier!

RAMFIS e SACERDOTI
        Gloria ai Numi! ognun rammenti                                    30
        Ch'essi reggono gli eventi —
        Che in poter dei Numi solo
        Stan le sorti dei guerrier.

MINISTRI e CAPITANI
        Su! del Nilo al sacro lido
        Sien barriera i nostri petti;                                     35
        Non eccheggi che un sol grido:
        Guerra e morte allo stranier!

RAD.    Sacro fremito di gloria
        Tutta l'anima mi investe —
        Su! corriamo alla vittoria!                                       40
        Guerra e morte allo stranier!
                                                                         {*}
AMN. [recando una bandiera e consegnandola a Radamès]
        Di mia man ricevi, o duce,
        Il vessillo glorioso;
        Ti sia guida, ti sia luce
        Della gloria sul sentier.                                         45

AIDA    (Perchè piango? per chi prego?…
        Qual poter m'avvince a lui!
        Deggio amarlo… ed è costui
        Un nemico… uno stranier!)

TUTTI   Guerra! guerra! sterminio all'invasor!                            50
        Va, Radamès, ritorna vincitor!                                   {*}
                        [escono tutti meno Aido]

   Les Mêmes, Le Roi, précédé de ses Gardes, et suivi de Ramphis;
    puis des Ministres, des Prêtres, des Officier, un Officier du
    Palais, puis un Messagger.

LE ROI               A l'heure du danger
            Votre roi fait appel à ses sujets fidèles.
            De l'Éthiopie arrive un messager,
            Il nous apprend d'importantes nouvelles.
            Vous l'entendrez.                     [A un officier]
                             Qu'il vienne devant moi.
LE MESSAGER [introduit par l'officier]
        L'Égypte a vu profaner ses frontières
        Par des tribus barbares!… Sur nos terres
        Leur main porta le meurtre et l'incendie, et fières
        De leurs premiers succès, semant l'effroi,
        Elles marchent déjà sur Thèbes!

TOUS                                  Quelle audace!

MESS.   Un chef vaillant qui ne fit jamais grâce
        Est à leur tête: Amonasro!

TOUS                             Le Roi!

AÏDA [à part] Mon père!

MESS.            Thèbes s'arme, et bientôt ses cent portes
              Vont lancer nos soldats
           Pour arrêter ces barbares cohortes!

LE ROI  Oui! guerre à mort! courons tous aux combats!

TOUS    Guerre! guerre implacable!
        Guerre terrible! inexorable!…

LE ROI [s'approchant de Radamès]
        Que ta volonté salute, Isis soit proclamée!…
          Ta voix nomma le chef de notre armée:
        Radamès!
TOUS            Radamès!
RAD.                    Je rende grâce aux dieux!

AÏDA [à part]  Je tremble!
AMN. [à part]            Il part!       
RAD.                            Le ciel comble mes v½ux!
LE ROI [à Radamès]
        Au temple de Vulcain, viens chercher sous la crypte
        L'armure consacrée et cours venger l'Égypte!
                O guerriers, sur ce rivage          [Aux soldats]
                Déployez votre courage,
                Que résonne un cri de rage
                Guerre et mort à l'étranger!

RAM.            O déesses fortunées!
                Nos fragiles destinées
                Dans vos mains sont enchainées.
                Aidez-nous à nous venger!

LES OFFICIERS et LES MINISTRES
                On verra sur ce rivage
                Éclater notre courage,
                Que résonne un cri de rage,
                Guerre et mort à l'étranger!

AÏDA [à part]   Je ne sais pour qui je pleure…
                Faut-il qu'il vive ou qu'il meure?
                Moi, l'aimer… quand à cette heure
                C'est l'ennemi, l'étranger!

RAD.            A mon âme se révèle
                La victoire la plus belle,
                Quand la gloire nous appelle
                Guerre et mort à l'étranger!

AMN. [présentant une bannière à Radamès]
                De ma main, ô chef suprême,
                Du pouvoir reçois l'emblème,
                D'un héros que chacun aime,
                Qu'il détourne le danger.

PRÊT.           Gloire aux dieux dont la puissance
                Va guider votre vaillance,
                Quelle soit notre espérance
                Et nous aide à nous venger!

TOUS       Guerre implacable et mort à l'agresseur!

AMN. [à Radamès] Pars et reviens vainqueur!

TOUS           Vers nous reviens vainqueur!
                        [Ils sortent tous, moins Aida]

AIDA    Ritorna vincitor!… E dal mio labbro
        Uscì l'empia parola! — Vincitore
        Del padre mio… di lui che impugna l'armi
        Per me… per ridonarmi
        Una patria, una reggia! e il nome illustre                         5
        Che qui celar mi è forza — Vincitore
        De' miei fratelli… ond'io lo vegga, tinto
        Del sangue amato, trionfar nel plauso
        Dell'Egizie coorti!… E dietro il carro,
        Un Re… mio padre… di catene avvinto!…                             10

        L'insana parola,
        O Numi, sperdete!
        Al seno d'un padre
        La figlia rendete;
        Struggete le squadre                                              15
        Dei nostri oppressor!

        Sventurata! che dissi?… e l'amor mio?…
        Dunque scordar poss'io
        Questo fervido amor che oppressa e schiava
        Come raggio di sol qui mi beava?                                  20
        Imprecherò la morte
        A Radamès… a lui che amo pur tanto!
        Ah! non fu in terra mai
        Da più crudeli angosce un core affranto.

        I sacri nomi di padre… di amante                                  25
        Nè profferir poss'io, nè ricordar…
        Per l'un… per l'altro… confusa… tremante…
        Io piangere vorrei… vorrei pregar.
        Ma la mia prece in bestemmia si muta…
        Delitto è il pianto a me… colpa il sospir…                        30
        In notte cupa la mente è perduta…
        E nell'ansia crudel vorrei morir.

        Numi, pietà — del mio soffrir!
        Speme non v'ha — pel mio dolor…
        Amor fatal — tremendo amor                                        35
        Spezzami il cor — fammi morir!                     [esce]    

AÏDA              Vers nous reviens vainqueur!
        Ma lèvre a prononcé cette parole impie!
        Quoi! lui, vainqueur d'un père armé pour m'arracher
                A mes tyrans! me rendre une patrie,
        Un trône, et le grand nom qu'ici je dois cacher!
           Quoi! vainqueur de mes frères!…
        Le verrai-je, les mains teintes d'un sang chéri,
        Triomphant, acclamé par nos fiers adversaires,
        Traînant après son char mon père… un roi!… flétri.
                      Du poids des fers meurtri!
                       Que cette parole
                       Loin de moi s'envole.
                       Qu'Aïda console
                       Un père adoré!
                       Périsse la race
                       D'un peuple abhorré!

               Ah dieux! Est-ce moi qui menace!…
                     Et mon amour!… Oh! non!…
           Puis-je oublier cette vive tendresse,
           Qui de l'esclave, ainsi qu'un gai rayon,
                     Charmait la détresse!…
           Moi! demander la mort de Radamès!…
                     De celui que j'adore!…
                     Ah! fut-il donc jamais
           Tourment semblable au feu qui me dévore?

           Ces noms sacrés et d'époux et de père,
           Ne puis-je donc, hélas! les murmurer?
           Pour l'un, pour l'autre, en ma douleur amère,
           Je ne voudrais que prier et pleurer.
           Mais la prière est, hélas! un blasphème,
           Mais les soupirs, les pleurs sont criminels,
           Et je n'ai plus qu'un refuge suprême,
           La froide mort et ses dons éternels!

             Grâce! grands dieux! c'est trop souffrir!
             Dans ma douleur plus d'espérance,
             Fatal amour, triste démence!…
             Brise mon c½ur, fais-moi mourir.   [Elle s'éloigne.]    

                            SCENA SECONDA

               Interno del Tempio di Vulcano a Menfi

   Una luce misteriosa scende dall'alto. —  Una lunga fila di
   colonne, l'una all'altra addossate, si perde fra le tenebre.
   Statue di varie Divinità.  Nel mezzo della scena,  sovra un
   palco coperto da tappeti, sorge l'altare sormontato da emblemi
   sacri.  Dai tripodi d'oro s'innalza il fumo degli incensi.

Sacerdoti e SacerdotesseRamfis ai piedi dell'altare — A suo
tempo RadamèsSi sente nell'intorno il canto delle Sacerdotesse
accompagnato dalle arpe.

SACERDOTESSE [nell'interno]
                Immenso Fthà, del mondo                                  {*}
                Spirito animator,
                Noi ti invochiamo!
                                 —
                Immenso Fthà, del mondo                                  {*}
                Spirto fecondator,                                         5
                Noi ti invochiamo!                                       {*}
                                 —
                Fuoco increato, eterno,
                Onde ebbe luce il sol,
                Noi ti invochiamo!
                                 —
SACERDOTI       Tu che dal nulla hai tratto                               10
                L'onde, la terra e il ciel,
                Noi ti invochiamo!
                                 —
                Nume che del tuo spirito
                Sei figlio e genitor,
                Noi ti invochiamo!                                        15
                                 —
                Vita dell'universo,
                Mito di eterno amor,
                Noi ti invochiamo!

  [Radamès viene introdotto senz'armi. Mentre va all'altare, le
    Sacerdotesse eseguiscono la danza sacra. Sul capo di Radamès
    vien steso un velo d'argento]

RAM.    Mortal, diletto ai Numi — A te fidate
        Son d'Egitto le sorti. — Il sacro brando                          20
        Dal Dio temprato, per tua man diventi
        Ai nemici terror, folgore, morte.
                                             [volgendosi al Nume]
        Nume, custode e vindice
        Di questa sacra terra,
        La mano tua distendi                                              25
        Sovra l'egizio suol.

RAD.    Nume, che duce ed arbitro
        Sei d'ogni umana guerra,
        Proteggi tu, difendi
        D'Egitto il sacro suol.                                           30

        [Mentre Radamès viene investito delle armi sacre,
          le Sacerdotesse ed i Sacerdoti riprendono l'Inno
          religioso e la mistica danza]

                           DEUXIÈME TABLEAU

             L'intérieur du temple de Vulcain à Memphis

   Une lumière mystériuese vient d'en haut. Une longue file de
    colonnes se perd dans les ténèbres.  Au milieu de la scène
    s'élève l'autel,  surmonté des emblèmes sacrés.   Dans les
    trépieds d'or brûlent des parfums.

           Prêtres et Prêtresses, Ramphis, puis Radamès

    Radamès est au pied de l'autel. On entend dans l'intérieur
   du temple, le chant des prêtresses accompagné par les harpes.


CH¼UR DES PRÊTRESSES [au dehors]
                Suprême Phtà! du monde,
                Toi, l'esprit créateur,
                Ma voix t'implore!
                             —
                Immense Phta, du monde,
                Toi, l'esprit protecteur,
                Ma voix t'implore!
                             —
                O toi, source féconde
                Du feu pur et brillant
                Nous t'implorons!
                             —
                Toi qui tiras la terre,
                L'eau, le ciel, du néant
                Nous t'implorons!
                             —
                Toi le fils et le père
                De ton être divin,
        Nous t'implorons, de la nature entière
                Toi la vie et la fin.


    [Radamès est introduit sans armes. Pendant qu'il se dirige
       vers l'autel, les prêtresses exécutent la danse sacrée.
       On tend un voile d'argent sur la tête de Radamès]

RAM.    Mortel aimé des dieux, notre patrie
           Remet à toi ton sort,
        Ce glaive saint que le ciel te confie
        Pour l'ennemi pliant sous ton effort
          Est l'effroi, la foudre, la mort!
                             [Se tournant vers la statue du dieu]
            O toi, dieu tutélaire
            De cette noble terre,
          Daigne étendre la main d'un père
            Sur ce sol adoré.

RAD.        Toi, l'arbitre sévère
            Du sort de toute guerre,
            Rends puissante et prospère
          La noble Égypte au sol sacré.

        [Pendant que Radamès reçoit les armes consacrées,
         les prêtresses et les prêtres reprennent l'hymne
         religieux et la danse mystique.]

                             ATTO SECONDO

                             SCENA PRIMA

               Una sala nell'appartamento di Amneris.

  Amneris circondata dalle Schiave  che l'abbigliano per la festa
  trionfale. Dai tripodi si eleva il profumo degli aromi. Giovani
  schiavi mori danzando agitano i ventagli di piume.

SCHIAVE Chi mai fra gli inni e i plausi
        Erge alla gloria il vol,
        Al par di un Dio terribile,
        Fulgente al par del sol?
        Vieni: sul crin ti piovano                                         5
        Contesti i lauri ai fior;                                        {*}
        Suonin di gloria i cantici
        Coi cantici d'amor.

AMN.    (Vieni, amor mio, mi inebria…
        Fammi beato il cor!)                                              10

SCHIAVE Or, dove son le barbare
        Orde dello stranier?
        Siccome nebbia sparvero
        Al soffio del guerrier.
        Vieni: di gloria il premio                                        15
        Raccogli o vincitor;
        T'arrise la vittoria,
        T'arriderà l'amor.

AMN.    (Vieni, amor mio, ravvivami
        D'un caro accento ancor!)                                         20

        Silenzio! Aida verso noi s'avanza…
        Figlia dei vinti, il suo dolor mi è sacro.
                    [ad un cenno di Amneris tutti si allontanano]
        Nel rivederla, il dubbio                                         {*}
        Atroce in me si desta…
        Il mistero fatal si squarci alfine!                               25

                             ACTE DEUXIÈME

                            SCÈNE PREMIÈRE

               Une salle dans l'appartement d'Amneris.

    Amneris est entourée d'esclaves  qui la parent pour la fête
    triomphale. De jeunes esclaves maures agitent des éventails
    de plumes.

CH¼UR       Au son des chants de guerre
            Il vient, le chef vaillant.
            Moins prompt est le tonnerre.
            Le jour est moins brillant.
            Tressons pour sa couronne
            Les roses, le laurier.
            Qu'un chant d'amour résonne
            Écho d'un chant guerrier!

AMN.        Ah! viens! toi que j'adore!
            Tu vis, je te revois!

CH¼UR       Où donc est cette armée
            Qui semait la terreur?
            Tout fuit, vaine fumée,
            Au souffle du vainqueur.
            Le prix de la victoire
            Est prêt à ton retour.
            A qui sourrit la gloire
            Bientot sourrit l'amour.

AMN.        Viens! que j'entende encore
            Le doux son de ton voix.
                              [Danses des petits escalves maures]
        Mais silence! Aïda s'avance; la voilà.
        Les siens ont succombé; sa douleur m'est sacrée.
               [sur un signe d'Amneris, les esclaves s'éloignent]
        A son aspect un doute affreux m'a déchirée!…   [l'observant]
        Ce mystère fatal bientôt s'éclaircira.

                           Amneris — Aida.

AMN. [ad Aida con simulata amorevolezza]
        Fu la sorte dell'armi a' tuoi funesta,
        Povera Aida! — Il lutto
        Che ti pesa sul cor teco divido.
        Io son l'amica tua…
        Tutto da me tu avrai — vivrai felice!                              5

AIDA    Felice esser poss'io
        Lungi dal suol natio… qui dove ignota
        M'è la sorte del padre e dei fratelli?…

AMN.    Ben ti compiango! pure hanno un confine
        I mali di quaggiù… Sanerà il tempo                                10
        Le angosce del tuo core…
        E più che il tempo, un Dio possente… amore.

AIDA [vivamente commossa]
        (Amore, amore! — gaudio… tormento…
        Soave ebbrezza — ansia crudel!…
        Ne' tuoi dolori — la vita io sento…                               15
        Un tuo sorriso — mi schiude il ciel).

AMN. [guardando Aida fissamente]
        (Ah! quel pallore… — quel turbamento
        Svelan l'arcana — febbre d'amor…
        D'interrogarla — quasi ho sgomento…
        Divido l'ansie — del suo terror…                                  20
                                [ad Aida fissandola attentamente]
        Ebben: qual nuovo fremito
        Ti assal, gentile Aida?
        I tuoi segreti svelami,
        All'amor mio ti affida…
        Tra i forti che pugnarono                                         25
        Della tua patria a danno…
        Qualcuno… un dolce affanno…
        Forse… a te in cor destò?…

AIDA    Che parli?…

AMN.                A tutti barbara
        Non si mostrò la sorte…                                           30
        Se in campo il duce impavido
        Cadde trafitto a morte…

AIDA    Che mai dicesti! ahi misera!…

AMN.    Sì… Radamès da' tuoi
        Fu spento… E pianger puoi?…                                       35

AIDA    Per sempre io piangerò!

AMN.    Gli Dei t'han vendicata…

AIDA                             Avversi sempre
        Mi furo i Numi…

AMN. [prorompendo con ira]
                          Ah! trema! in cor ti lessi!…
        Tu l'ami…

AIDA              Io…

AMN.                    Non mentire!…
        Un detto ancora e il vero                                         40
        Saprò… Fissami in volto…
        Io t'ingannai… Radamès vive…

AIDA [con esaltazione, inginocchiandosi]  Ei vive!
        Sien grazie ai Numi!

AMN.                        E mentir speri ancora?…
        Sì… tu l'ami… Ma l'amo               [nel massimo furore]
        Anch'io… comprendi tu?… son tua rivale…                           45
        Figlia dei Faraoni…

AIDA [con orgoglio, alzandosi]
                            Mia rivale!
        Ebben sia pure… Anch'io…
        Son tal…                                   [reprimendosi]        {*}
                 Che dissi mai?… pietà! perdono!

        Pietà ti prenda del mio dolore…
        È vero… io l'amo d'immenso amore…                                 50
        Tu sei felice… tu sei possente…
        Io vivo solo per questo amor.

AMN.    Trema, o vil schiava! spezza il tuo core…
        Segnar tua morte può questo amore…
        Del tuo destin arbitra io sono,                                   55
        D'odio e vendetta le furie ho in cor.
                        [suoni interni]                                  {*}
        Alla pompa che si appresta,
        Meco, o schiava, assisterai;
        Tu prostrata nella polve,
        Io sul trono, accanto al Re.                                      60
        Vien… mi segui… e apprenderai
        Se lottar tu puoi con me.

AIDA    Ah! pietà!… che più mi resta?
        Un deserto è la mia vita:
        Vivi e regna, il tuo furore                                       65
        Io fra breve placherò.
        Questo amore che ti irrita
        Nella tomba spegnerò.                                            {*}

                           Amneris — Aida.

AMN. [à Aïda]
          La fortune te traite en ennemie.
        Pauvre Aïda! Le poids d'un destin rigoureux
            Je le partage! A toi ma seule amie,
              Parle sans contrainte; — je veux
                       Te voir heureuse!

AÏDA    Heureuse!… ah! puis-je l'être
        Loin du pays natal, seule et sans rien connaître
        Du destin de mon père et des miens.
AMN.                                      Je te plains
                Mais à tous nos chagrins
                Dieu laissa l'espérance.
        Seul, quelque jour le temps calmera ta souffrance,
           Et plus encore… un dieu puissant! l'amour!

AÏDA [à part, vivement émue]
             L'amour! l'amour! il tue, enivre,
             Bonheur divin, tourment cruel,
             Dans ces douleurs je me sens vivre,
             Un seul regard m'ouvre le ciel!

AMN. [regardant fixement Aïda]
             Quelle pâleur! quel trouble extrême!
             Et quelle fièvre dans son c½ur!
             Je connaîtrai celui qu'elle aime,
             Je saurais d'où vient sa douleur!
                Dis-moi quelle tristesse,                [à Aida]
                Chère Aïda, t'oppresse.
                Que toute crainte cesse,
             Ouvre ton âme à ma tendresse,
                A quelqu'un des soldats
                De cette lutte ardente
                Ton âme impatiente,
             Dis-moi, ne rêvait-elle pas?

AÏDA            Qu'entends-je?…

AMN.                            A tous le sort
                N'a pas été contraire,
                Si notre chef est mort,
                Frappé dans cette guerre…

AÏDA         Que veux-tu dire? jour d'horreur!

AMN.         Oui! Radamès perdit la vie.

AÏDA         Sort affreux!…

AMN.                       Toi! son ennemie…

AÏDA        O jour d'éternelle douleur!

AMN.      Les dieux t'ont bien vengée!

AÏDA                                 Ah! leur colère
        Me poursuit sans repos!

AMN.                          Tremble! car dans ton c½ur
             J'ai lu! tu l'aimes!… sois sincère!
        Un mot encore, un seul mot désormais
        Regarde-moi! je t'ai trompée, et Radamès…
                     Il vit…

AÏDA [avec exaltation et tombant à genoux]
                     Ah! dieux suprêmes!…

AMN. [avec fureur]
             Peux-tu mentir encor!… oh! oui! tu l'aimes!
                Je l'aime aussi! n'ignore rien!
                       Je suis ta rivale!
        Fille des Pharaons!

AÏDA                      Toi! ma rivale! Eh bien…
        Je suis aussi…                               [s'arrêtant]
                       Que dis-je! ô parole fatale,
        Pour moi pardon! ah! prends pitié de ma douleur!
             C'est vrai!… je l'aime avec ardeur.
                    Tu regnes fière
                    Dans cette cour,
                    Je n'ai sur terre
                    Que mon amour.

AMN.                Ah! tremble, esclave
                    Crains mon courroux!
                    Si ton c½ur brave
                    Mon c½ur jaloux,
                    A ma puissance
                    Tout doit céder,
                    Et la vengeance
                    Ne peut tarder!
                       [On entend au dehors des chants de guerre]
             A me suivre, allons, sois prête,
             Qu'on nous voie à cette fête
             Toi, courbant bien bas la tête
             Moi, sur le trône des rois!

AÏDA         Ah! pitié! sois moins sévère,
                    Pitié! tu vois
               L'excès de ma misère!
             Vis et règne! la colère
             Dans ton c½ur se calmera,
             Car la flamme qui t'offense
             Dans la tombe s'éteindra.
AMN.         Viens! suis-moi!… je sais d'avance
             Qui des deux l'emportera.                [Elle sort]
                                      
CH¼UR        On a vu sur ce rivage                    [au dehors]
             Éclater notre courage,
             Que résonne un cri de rage…

AÏDA [seule]
        Grâce, grand dieux! c'est trop souffrir:
        Pitié! pitié!… plutôt mourir.

                           SCENA SECONDA

                Uno degli ingressi della Città di Tebe.

Sul davanti un gruppo di palme. A destra il tempio di Ammone — a
  sinistra un trono sormontato da un baldacchino di porpora. —
  Nel fondo una porta trionfale. — La scena è ingombra di popolo.

   Entra il Re, seguito dai Ministri, Sacerdoti, Capitani,
     Flabelliferi, Porta insegne, ecc. ecc. Quindi Amneris con
     Aida e SchiaveIl Re va a sedere sul trono. Amneris
     prende posto alla sinistra del Re.

POPOLO      Gloria all'Egitto e ad Iside
            Che il sacro suol protegge;
            Al Re che il Delta regge
            Inni festosi alziam!
            Vieni, o guerriero vindice,                                    5
            Vieni a gioir con noi;
            Sul passo degli eroi
            I lauri e i fior versiam!

DONNE       S'intrecci il loto al lauro
            Sul crin dei vincitori;                                       10
            Nembo gentil di fiori
            Stenda sull'armi un vel.
            Danziam, fanciulle egizie,
            Le mistiche carole,
            Come d'intorno al sole                                        15
            Danzano gli astri in ciel!

SAC.        Della vittoria gli arbitri
            Supremi il guardo ergete;
            Grazie agli Dei rendete
            Nel fortunato dì.                                             20

   [Le truppe Egizie, precedute dalle fanfare, sfilano dinanzi
    al Re — Seguono i carri di guerra, le insegne, i vasi sacri,
    le statue degli Dei — Un drapello di danzatrici che recano i
    tesori dei vinti — Da ultimo Radamès, sotto un baldacchino
    portato da dodici uffiziali].

IL RE [che scende dal trono per abbracciare Radamès]
        Salvator della patria, io ti saluto.
        Vieni, e mia figlia di sua man ti porga
        Il serto trionfale.
   [Radamès s'inchina davanti ad Amneris che gli porge la corona]

IL RE [a Radamès]           Ora, a me chiedi
        Quanto più brami. Nulla a te negato
        Sarà in tal dì — lo giuro                                         25
        Per la corona mia, pei sacri Numi.

RAD.    Concedi in pria che innanzi a te sien tratti
        I prigionier…

            [entrano fra le guardie i prigionieri Etiopi, ultimo
             Amonasro, vestito da uffiziale]

AIDA                    Che veggo!… Egli?… mio padre!

TUTTI   Suo padre!

AMN.               In poter nostro!…

AIDA [abbracciando il padre]
        Tu! Prigionier!

AMON. [piano ad Aida]   Non mi tradir!

IL RE [ad Amonasro]                    Ti appressa…                       30
        Dunque… Tu sei?…

AMON.                    Suo padre…  Anch'io pugnai…
        Vinti noi fummo e morte invan cercai.
                            [accennando alla divisa che lo veste]
        Questa assisa ch'io vesto vi dica
        Che il mio Re, la mia patria ho difeso:
        Fu la sorte a nostr'armi nemica…                                  35
        Tornò vano dei forti l'ardir.
        Al mio piè nella polve disteso
        Giacque il re da più colpi trafitto;
        Se l'amor della patria è delitto
        Siam rei tutti, siam pronti a morir!                              40
                     [volgendosi al Re con accento supplichevole]
        Ma tu, o Re, tu signore possente,
        A costoro ti volgi clemente…
        Oggi noi siam percossi dal fato,
        Doman voi potria il fato colpir.

AIDA, PRIGIONIERI, SCHIAVE
        Sì: dai Numi percossi noi siamo;                                  45
        Tua pietà, tua clemenza imploriamo;
        Ah! giammai di soffrir vi sia dato
        Ciò che in oggi n'è dato soffrir!

RAMFIS, SACERDOTI
        Struggi, o Re, queste ciurme feroci,
        Chiudi il core alle perfide voci.                                 50
        Fur dai Numi votati alla morte,
        Si compisca dei Numi il voler!                                   {*}

POPOLO  Sacerdoti, gli sdegni placate,
        L'umil prece dei vinti ascoltate;
        E tu, o Re, tu possente, tu forte,                                55
        A clemenza dischuidi il pensier.

RAD. [fissando Aida]
        (Il dolor che in quel volto favella
        Al mio sguardo la rende più bella;
        Ogni stilla del pianto adorato
        Nel mio petto ravviva l'amor).                                    60

AMN.    (Quali sguardi sovr'essa ha rivolti!
        Di qual fiamma balenano i volti!
        E a tal sorte serbata son io?…                                   {*}
        La vendetta mi rugge nel cor).

IL RE   Or che fausti ne arridon gli eventi                               65
        A costoro mostriamci clementi;
        La pietà sale ai Numi gradita
        E rafferma dei prenci il poter.

RAD. [al Re]  O Re: pei sacri Numi,
        Per lo splendore della tua corona,                                70
        Compier giurasti il voto mio…

IL RE                                 Giurai.

RAD.    Ebbene: a te pei prigionieri Etiopi
        Vita domando e libertà.

AMN.                            (Per tutti!)

SAC.    Morte ai nemici della patria.

POPOLO                                Grazie
        Per gli infelici!

RAM.                      Ascolta, o Re —             [a Radamès]
                                        Tu pure,                          75
        Giovine eroe, saggio consiglio ascolta:

        Son nemici e prodi sono…
        La vendetta hanno nel cor,
        Fatti audaci dal perdono
        Correranno all'armi ancor!                                        80

RAD.    Spento Amonasro il re guerrier, non resta
        Speranza ai vinti.

RAM.                       Almeno
        Arra di pace e securtà, fra noi
        Resti col padre Aida…
        Gli altri sien sciolti.                                          {*}

IL RE                           Al tuo consiglio io cedo.                 85
        Di securtà, di pace un miglior pegno
        Or io vo' darvi — Radamès, la patria
        Tutto a te deve — D'Amneris la mano
        Premio ti sia. Sovra l'Egitto un giorno
        Con essa regnerai…

AMN.                       (Venga or la schiava,                          90
        Venga a rapir l'amor mio… se l'osa!)

IL RE   Gloria all'Egitto e ad Iside
        Che il sacro suol difende,
        S'intrecci il loto al lauro
        Sul crin del vincitor!                                            95

SAC.    Inni leviamo ad Iside
        Che il sacro suol difende;
        Preghiam che i fati arridano
        Fausti alla patria ognor.

AIDA    (Qual speme omai più restami?                                    100
        A lui la gloria e il trono…
        A me l'oblio… le lacrime
        Di disperato amor).

PRIG.   Gloria al clemente Egizio
        Che i nostri ceppi ha sciolto,                                   105
        Che ci ridona ai liberi
        Solchi del patrio suol!

RAD.    (D'avverso Nume il folgore                                       {*}
        Sul capo mio discende…
        Ah! no! d'Egitto il soglio                                       110
        Non val d'Aida il cor).

AMN.    (Dall'inatteso giubilo                                           {*}
        Inebriata io sono;
        Tutti in un dì si compiono
        I sogni del mio cor).                                            115

AMON. [ad Aida]
        Fa cor: della tua patria
        I lieti eventi aspetta;
        Per noi della vendetta
        Già prossimo è l'albor.

POPOLO  Gloria all'Egitto e ad Iside                                     120
        Che il sacro suol difende!
        S'intrecci il loto al lauro
        Sul crin del vincitor!

                          DEUXIÈME TABLEAU

                Une des entrées de la ville de Thèbes.

    Groupes de palmiers — A droite le temple d'Ammon; à gauche un
  trône surmonté d'un dais de pourpre. Au fond une porte triomphale.


 Le roi entre, suivi des prêtres, capitaines, etc., puis entre
    Amneris avec Aïda et les esclaves. Le roi va s'asseoir sur
    le trône. Amneris prend place à la gauche du roi.


LE PEUPLE   Gloire à l'Égypte, au noble roi
                   Que le Delta révère!
                   Isis, que la prière
                   S'élève jusqu'à toi!
            Vois en tous lieux, triomphateur,
                   Ta gloire proclamée…
                   Que de fleurs soit semée
                   La route du vainqueur.

LES FEMMES         Aux palmes triomphantes,
                   Aux roses odorantes
                   Mêlez les fleurs brillantes
                   Du lotus sans pareil;
                   Que s'enlacent nos rondes
                   En mystères fécondes
                   Comme tournent les mondes
                   Autour du chaud soleil.

LES PRÊTRES        Isis sourit aux c½urs pieux.
                   Que vos hymnes résonnent
                   Et des biens qu'ils nous donnent
                   Rendez grâce aux dieux.

   [Les troupes égyptiennes précédées de fanfares défilent devant
      le roi. Viennent ensuite les chars de guerre, les insignes,
      les images des dieux;  une troupe de danseuses apporte les
      trésors des vaincus;  enfin apparaît Radamès sous un dais,
      porté par douze officiers.]

LE ROI [descendant de son trône pour embrasser Radamès]
          Sauveur de ton pays, salut à toi!
          Ma fille de ses mains royales
          Te vient offrir les palmes triomphales.
    [Radamès s'incline devant Amneris, qui lui offre la couronne]
                    Parle! demande-moi
              Ce que tu veux; je te le donne.
        Il n'est rien en ce jour qu'on n'accorde à tes v½ux,
              Je le jure par ma couronne,
              J'en jure par les dieux.

RAD.        Permets d'abord, ô prince, qu'à tes yeux
        Paraissent mes captives.

LES PRÊTRES                     Rendons grâces aux dieux.


AÏDA [apercevant Amonasro]
             Que vois-je!… toi!… mon père!

TOUS                     Son père!…

AMN.    En nos mains!…


AÏDA                  Prisonnier! toi!…

AMON. [bas]                           Ne me trahis pas!

LE ROI [à Amonasro]
        Approche! Tu serais…

AMON.                      Son père! un adversaire
        Vaincu par vous! En vain j'ai cherché le trépas
          Pour mon roi, ma patrie alarmée,
          J'ai lutté, j'ai guidé notre armée.
          Mais l'effort d'une race opprimée
          Fut trahi par le dieu des combats.
          Devant moi notre roi magnanime
          Expire triste et noble victime.
          Si chérir sa patrie est un crime,
          C'est le nôtre, et j'attends le trépas.
                                           [au roi, en suppliant]
          O grand roi, quand le sort nous accable
          Viens nous tendre une main secourable,
          La fortune aujourd'hui favorable,
          Peut demain vous montrer sa rigueur!

LES CAPTIFS
          Décimés et privés d'espérance
          Nous venons implorer ta clémence.
          Que le ciel d'une telle souffrance
          Vous épargne à jamais la rigueur!

RAMPHIS et LES PRÊTRES
          Il le faut, que leur race périsse!
          De nos dieux que l'arrêt s'accomplisse,
          Quand le ciel a dicté leur supplice,
          O grand roi, pourrais-tu pardonner?

PEUPLE    Ah! calmez cette aveugle colère,
          Des vaincus écoutez la prière,
          Roi puissant, ta victoire est entière,
          Sans pitié pourrais-tu pardonner?

RAD. [regardant Aïda]
          Je la vois qui frémit, qui chancelle,
          Son effroi me la montre plus belle;
          Oui, l'amoour m'a touché de son aile
          Et mon c½ur s'abandonne à ses lois.

AMN. [à part, regardant Radamès]
          Quels regards il dirige sur elle!
          Quelle flamme en ses yeux étincelle!
          Faudra-t-il d'une esclave rebelle
          Supporter tant d'affronts à la fois!

LE ROI    La défaite a puni leur offense
          Ne pourrais-je oublier ma vengeance!
          C'est le ciel qui le veut! la clémence
          Raffermit la puissance des rois.

RAD.        O roi!… par le ciel même,
            Par l'éclat de ton diadème
        Tu juras d'accomplir mes v½ux.

LE ROI                                 Je l'ai promis!

RAD.      Eh bien, pour ces captifs soumis
            Qu'un sort cruel menace,
            Je demande la vie et la liberté.

AMN.                                        Quoi!
        Pour tous?

PRÊTRES          Mort aux vaincus! point de faiblesse!

PEUPLE    Pour ces infortunés!…

RAM.                          Écoute! o roi!… 
                                                      [à Radamès]
        Et toi, jeune héros, Dieu parle! écoute-moi!…
                Pleins de haine et de vaillance,
                La vengeance est dans leur c½ur,
                Enhardis par ta clémence
                Ils reprendront leur fureur!

RAD.    Amonasro, leur prince, est tombé sous nos coups,
        Pour eux plus d'espérance.

RAM.                             Au moins que, parmi nous,
                  Aïda comme otage
        Demeure avec son père!

LE ROI                       Oui! ton conseil est sage.
                Mais pour nous de la paix
                Il est le meilleur gage.
        Radamès! le pays doit tout à tes haut faits,
        Sois l'époux d'Amneris! sois l'espoir de ma race!
        Sur l'Égypte tous deux vous regnerez un jour.

AMN. [à part]
        Viens donc, esclave, viens! si tu l'oses, en face
                Me ravir son amour!

LE PEUPLE et LES CAPTIFS
          Gloire à l'Égypte, au noble roi
              Que le Delta révère,
              Isis! que la prière
              S'élève jusqu'à toi!…

LES PRÊTRES
          Isis, tes fils reconnaissants
              Te doivent leur victoire.
              Sois bénie, ô toi qui défends
              L'Égypte et ses enfants.

RAD. [à part]
          Dieux ennemis! ah! dans ce jour
              Tout espoir m'abandonne.
              Aïda, la couronne
              Ne vaut pas ton amour!

AÏDA [à part]
          Ah! tout espoir a fui mon c½ur!
              A lui puissance et gloire!
              A moi la honte et la douleur
              D'une fatale ardeur!

AMN.      Les dieux hâtèrent son retour,
              A peine j'ose y croire
              Je vois s'accomplir en ce jour
              Tous mes rêves d'amour.

AMON. [à Aida]
          Courage! un peuple ne meurt pas:
              Renais à l'espérance,
              Avant peu la vengeance
              Saura guider nos pas.






                             ATTO  TERZO

                          Le Rive del Nilo.

    Roccie di granito fra cui crescono dei palmizii. Sul vertice
       delle roccie  il tempio d'Iside  per metà nascosto tra le
       fronde. È notte stellata. Splendore di luna.

CORO            O tu che sei d'Osiride               [nel tempio]
                Madre immortale e sposa,         
                Diva che i casti palpiti
                Desti agli umani in cor;
                Soccorri a noi pietosa,                                    5
                Madre d'eterno amor.                                     {*}

        [Da una barca che approda alla riva, discendono Amneris,
         Ramfis, alcune donne coperte da fitto velo e Guardie]

RAM.    Vieni d'Iside al tempio — alla vigilia         [ad Amn.]
        Delle tue nozze, implora                                         {*}
        Della Diva il favore — Iside legge
        Dei mortali nel cuore — ogni mistero                              10
        Degli umani a lei noto.

AMN.    Sì: pregherò che Radamès mi doni
        Tutto il suo cor, come il mio cor a lui
        Sacro è per sempre…

RAM.                          Entriamo.
        Pregherai fino all'alba — io sarò teco.                           15

        [Tutti entrano nel tempio. Il Coro ripete il canto sacro]

AIDA [entra cautamente coperta da un velo]
        — Qui Radamès verrà… Che vorrà dirmi?
        Io tremo… Ah! se tu vieni
        A recarmi, o crudel, l'ultimo addio,
        Del Nilo i cupi vortici
        Mi daran tomba… e pace forse… e oblio.                            20
        O cieli azzurri… o dolci aure native                             {*}
        Dove sereno il mio mattin brillò…
        O verdi colli… o profumate rive…
        O patria mia, mai più ti rivedrò!
        O fresche valli… o queto asil beato                               25
        Che un dì promesso dall'amor mi fu…
        Ahime! d'amore il sogno è dileguato…
        O patria mia, non ti vedrò mai più!

                             ACTE TROISIÈME

                            Les rives du Nil.
     Roches de granit parmi lesquelles croissent des palmiers. —
     Sur le sommet des roches le temple d'Isis, à demi caché par
     les arbres. — Il fait nuit. — La lune resplendit.

CH¼UR           O toi, l'épouse d'Osiris,        [dans le temple]
                    O toi, sa tendre mère,         
                Qui de l'amour, aux c½urs épris
                    Dévoiles le mystère,
                Écoute ma prière,
                Toute puissante Isis.
        [D'une barque qui s'arrête, on voit descendre Amneris,
         Ramphis, quelques femmes voilées et des gardes]
RAM.    Viens implorer Isis, l'heure s'avance!       [à Amneris]
               L'heure d'hymen!
        De la déesse invoquons la puissance,
               Aucun secret humain
               N'échappe à sa science
               Et l'avenir lointain
               Et s'éclaire et rayonne!
AMN.    Je la prierai que Radamès me donne
              Tout son amour,
        Comme mon âme est à lui tout entière!
RAM.       Suis-moi, nous prierons jusqu'au jour. 
        Je t'accompagne.            [Ils entrent dans le temple.]
CH¼UR [dans le temple]  Exauce ma prière,
                  Toute-puissante Isis,
                  O toi, l'épouse d'Osiris,
                  O toi, sa tendre mère.
AÏDA [couverte d'un voile, s'avance avec précaution]
        Radamès va venir. Que doit-il m'annoncer?
           Je tremble! Ah! si tu viens pour prononcer
                Cruel, l'adieu suprême,
           Les flots du Nil rapide, pour jamais
            M'offre la tombe et la paix,
               Et l'oubli de moi-même.
           O mon pays, je ne dois plus te voir!
           O ciel d'azur, ô rives parfumées!
           Adieu grand bois où je venais m'asseoir!
           De mon enfance, ô campagnes aimées,
           O mon pays, je ne dois plus te voir!
           O frais vallons, grands bois où dans un rêve,
           Mon c½ur s'était bercé d'un tendre espoir,
           Quand de l'amour le songe heureux s'achève,
           O mon pays, je ne dois plus te voir!
  Aïda est plongée dans sa douleur — Elle entend marcher et se
        lève croyant voir Radamès. Elle aperçoit Amonasro.

                          Amonasro — Aida.

AIDA    Cielo! mio padre!

AMON.                     A te grave cagione
        Mi adduce, Aida. Nulla sfugge al mio
        Sguardo — D'amor ti struggi
        Per Radamès… ei t'ama… e qui lo attendi.
        Dei Faraon la figlia è tua rivale…                                 5
        Razza infame, aborrita e a noi fatale!

AIDA    E in suo potere io sto!… Io, d'Amonasro
        Figlia!

AMON.           In poter di lei!…  No!… se lo brami
        La possente rival tu vincerai,
        E patria e trono, e amor, tutto tu avrai.                         10

        Rivedrai le foreste imbalsamate,
        Le fresche valli, i nostri templi d'ôr!…

AIDA    Rivedrò le foreste imbalsamate,           [con trasporto]
        Le nostre valli, i nostri templi d'ôr!…

AMON.   Sposa felice a lui che amasti tanto,                              15
        Tripudii immensi ivi potrai gioir…

AIDA    Un giorno solo di si dolce incanto…                [c.s.]
        Un'ora di tal gaudio… e poi morir!                               {*}

AMON.   Pur rammenti che a noi l'Egizio immite,
        Le case, i tempii e l'are profanò…                                20
        Trasse in ceppi le vergini rapite…
        Madri… vecchi e fanciulli ei trucidò.

AIDA    Ah! ben rammento quegli infausti giorni!
        Rammento i lutti che il mio cor soffrì…
        Deh! fate, o Numi, che per noi ritorni                            25
        L'alba invocata dei sereni di.

AMON.   Non fia che tardi — In armi ora si desta
        Il popol nostro — tutto pronto è già…
        Vittoria avrem… Solo a saper mi resta
        Qual sentiero il nemico seguirà…                                  30

AIDA    Chi scoprirlo potria? chi mai?

AMON.                                 Tu stessa!

AIDA    Io!…

AMON.        Radamès so che qui attendi… Ei t'ama…
        Ei conduce gli Egizii… Intendi?…

AIDA                                     Orrore!
        Che mi consigli tu? No! no! giammai!

AMON. [con impeto selvaggio]
                Su, dunque! sorgete                                       35
                Egizie coorti,
                Col fuoco struggete
                Le nostre città…
                Spargete il terrore,
                Le stragi, le morti…                                      40
                Al vostro furore
                Più freno non v'ha.

AIDA    Ah! padre!…

AMON. [respingendolo]  Mia figlia
            Ti chiami!…

AIDA [atterrita e supplichevole]   Pietà!

AMON.       Flutti di sangue scorrono                                     45
            Sulle città dei vinti…
            Vedi? dai negri vortici
            Si levano gli estinti…
            Ti additan essi e gridano:
            Per te la patria muor!                                        50

AIDA        Pietà!…

AMON.               Una larva orribile
            Fra l'ombre a noi s'affaccia…
            Trema! le scarne braccia
            Sul capo tuo levò…
            Tua madre ell'è… ravvisala…                                   55
            Ti maledice…

AIDA [nel massimo terrore]    Ah no!
            Padre…

AMON. [respingendolo] Va indegna! non sei mia prole…                     {*}
        Dei Faraoni tu sei la schiava.

AIDA    Padre, a costoro schiava io non sono…
        Non maledirmi… non imprecarmi…                                    60
        Tua figlia ancora potrai chiarmarmi…
        Della mia patria degna sarò.

AMON.   Pensa che un popolo, vinto, straziato
        Per te soltanto risorger può…

AIDA    O patria! o patria… quanto mi costi!                              65

AMON.   Coraggio  ei giunge… là tutto udrò…
                                     [si nasconde fra i palmizii]

                          Amonasro — Aida.

AÏDA    Ciel! mon père!

AMON.                  Aïda, le moment est suprême!
                    Rien n'échappe à mes yeux.
        Ton c½ur brûle d'amour pour Radamès! Il t'aime,
                       Tu l'attends en ces lieux!
           Des Pharaons la fille est ta rivale;
        Race infâme, abhorrée, à tous les miens fatale!

AÏDA    Je suis en leur pouvoir, moi, la fille d'un roi!


AMON.        En leur pouvoir? non, la vengeance
                    Est prochaine, crois-moi!
           Oui, tu vaincras ta rivale! Puissance,
               Patrie, amour, tout est à toi!
        Tu reverras cette terre bénie,
        Nos frais vallons, les temples de nos dieux.

AÏDA    Je reverrai cette terre bénie,
        Nos frais vallons, les temples de nos dieux.

AMON.   Heureuse épouse à ton époux unie,
        Vôtre bonheur surpassera vos v½ux.

AÏDA    Pour un seul jour jouir de cette ivresse
        Un jour, une heure, et puis après mourir!

AMON.   Souviens-toi bien de ces jours de détresse
        Où l'ennemi vint tout anéantir…
        Puis il partit emmenant ses captives:
        Femmes, vieillards, enfants, tout a péri.

AÏDA    Je crois entendre encor leurs voix plaintives
        O souvenirs dont mon c½ur est meurtri:
        De jours meilleurs, puisse après tant d'alarmes,
        Puisse briller l'aurore à nos regards.

AMON.       Déjà notre peuple est en armes,
            Nous les vaincrons et sans retards
               Il me reste à connaître
        Par quel chemin l'ennemi doit paraître.

AÏDA    Qui saura leurs secrets?

AMON.                           Qui donc? toi-même!…

AÏDA    Moi!

AMON.        Radamès va venir. Il t'aime!
        Il conduit leurs soldats… tu comprends…

AÏDA                                         Quel blasphème!
        Que me conseilles-tu! non! non! jamais!

AMON. [avec une impétuosité sauvage]
                Sortez de vos tentes,
                Hordes triomphantes,
                De ruines fumantes
                Couvrez la cité!
                Semez au passage
                L'effroi, le carnage,
                Que dans votre rage
                Tout soit dévasté!

AÏDA            Ah! pitié mon père!

AMON.           Toi! ma fille?… arrière!
            Vois donc rouler ces flots sanglants
                Au sein de nos murailles
            Les morts se lèvent frémissants,
                Privés de funérailles.
            Entends vers toi monter leurs cris:
                C'est toi qui nous trahis!

AÏDA            Pitié! pitié, mon père!

AMON.   Un spectre courroucé
                        dans l'ombre suit tes pas,
        Tremble! le vois-tu bien!…
                        il tend vers toi les bras.

AÏDA              Non! grâce!…

AMON.                C'est ta mère
        Qui te maudit!…

AÏDA                   Non! non!… grâce! pitié, mon père,


AMON.               Toi, ma fille!… non! non!…
        Des Pharaons tu n'est que l'esclave!…

AÏDA                             Pardon!
              Grâce, mon père, ah! je t'implore!
              Sans me maudire écoute-moi.
        Non! ta fille n'est pas esclave! Elle est encore
                    Digne de toi!

AMON.      Songe qu'un peuple entier dans sa furie
           Grâce à toi seule triomphera!…

AÏDA          Quel sacrifice! ô ma patrie!…

AMON.         Courage! il vient! moi, je suis là!

                                 [il se cache parmi les palmiers]

                           Radamès — Aida.

RAD.    Pur ti riveggo, mia dolce Aida…

AIDA    Ti arresta, vanne… che speri ancor?

RAD.    A te dappresso l'amor mi guida.

AIDA    Te i riti attendono d'un altro amor.
        D'Amneris sposo…

RAD.                     Che parli mai?…                                   5
        Te sola, Aida, te deggio amar.
        Gli Dei m'ascoltano… tu mia sarai…

AIDA    D'uno spergiuro non ti macchiar!
        Prode t'amai, non t'amerei spergiuro.

RAD.    Dell'amor mio dubiti, Aida?

AIDA                                E come                                10
        Speri sottrarti d'Amneris ai vezzi,
        Del Re al voler, del tuo popolo ai voti,
        Dei sacerdoti all'ira?

RAD.                           Odimi, Aida.
        Nel fiero anelito di nuova guerra
        Il suolo Etiope si ridestò…                                       15
        I tuoi già invadono la nostra terra,
        Io degli Egizii duce sarò.
        Fra il suon, fra i plausi della vittoria,
        Al Re mi prostro, gli svelo il cor…
        Sarai tu il serto della mia gloria,                               20
        Vivrem beati d'eterno amor.

AIDA    Nè d'Amneris paventi
        Il vindice furor? la sua vendetta,
        Come folgor tremenda,
        Cadrà su me, sul padre mio, su tutti.                             25

RAD.    Io vi difendo.

AIDA                   Invan! tu nol potresti…
        Pur… se tu m'ami… ancor s'apre una via
        Di scampo a noi…

RAD.                     Quale?

AIDA                            Fuggir…

RAD.                                    Fuggire!

AIDA [colla più viva espansione]
            Fuggiam gli ardori inospiti
            Di queste lande ignude;                                       30
            Una novella patria
            Al nostro amor si schiude…
            Là… tra foreste vergini,
            Di fiori profumate,
            In estasi ignorate                                            35
            La terra scorderem.

RAD.        Sovra una terra estrania
            Teco fuggir dovrei!
            Abbandonar la patria,
            L'are de' nostri Dei!                                         40
            Il suol dov'io raccolsi
            Di  gloria i primi allori,
            Il ciel dei nostri amori
            Come scordar potrem?

AIDA        Sotto il mio ciel, più libero                                 45
            L'amor ne fia concesso;
            Ivi nel tempio istesso
            Gli stessi Numi avrem.

RAD. [esitante]   Aida!

AIDA    Tu non m'ami… Va!…

RAD.                        Non t'amo.                                    50
        Mortal giammai nè Dio
        Arse d'amor al par del mio possente.

AIDA    Va… va… ti attende all'ara
        Amneris…

RAD.             No!… giammai!…

AIDA                            Giammai, dicesti?
        Allor piombi la scure                                             55
        Su me, sul padre mio…

RAD.                          Ah no!  fuggiamo!
                                   [con appassionata risoluzione]
            Sì: fuggiam da queste mura,
            Al deserto insiem fuggiam;
            Qui sol regna la sventura,
            Là si schiude un ciel d'amor.                                 60
            I deserti interminati
            A noi talamo saranno,
            Su noi gli astri brilleranno
            Di più limpido fulgor.

AIDA        Nella terra avventurata                                       65
            De' miei padri il ciel ne attende;
            Ivi l'aura è imbalsamata,
            Ivi il suolo è aromi e fior.
            Fresche valli e verdi prati
            A noi talamo saranno                                          70
            Su noi gli astri brilleranno
            Di più limpido fulgor.

AIDA-RAD.   Vieni meco — insiem fuggiamo
            Questa terra di dolor —
            Vieni meco — io t'amo, io t'amo!                              75
            A noi duce fia l'amor.
                                     [si allontanano rapidamente]

AIDA [arrestandosi all'improvviso]
        Ma dimmi: per qual via
        Eviterem le schiere
        Degli armati?

RAD.                  Il sentier scelto dai nostri
        A piombar sul nemico fia deserto                                  80
        Fino a domani…

AIDA                   E quel sentier?…

RAD.                                    Le gole
        Di Napata…

                           Aïda — Radamès.

RAD. [avec transport]
        Je te revois enfin, chère âme!…

AÏDA                       Qui t'amène?
        Qu'espères-tu? va-t-en!

RAD.                            L'amour m'enchaîne…
        L'amour vers toi me guide!

AÏDA                            Un autre amour t'attend.
        L'autel est prêt, la main d'Amneris…

RAD.                                    Dieu m'entend!
           C'est toi que j'aime et d'une flamme pure!
           J'en fais serment, je veux vivre pour toi.

AÏDA          Garde-toi bien d'être parjure!
           Pourrais-je aimer qui trahirait sa foi?

RAD.       Tu douterais de mon amour!

AÏDA                                Je doute!
           De te soustraire aux projets d'Amneris;
           Aux v½ux du roi, des ministres d'Isis…
        Aux v½ux de tout un peuple!…

RAD.                                Eh bien… écoute!…
                Déjà tout prêt à d'autres guerres
                L'Éthiopien vole aux combats!
            Déjà les tiens s'élancent sur nos terres…
            De nos guerriers je dois guider les pas.
                Dans mon triomphe et dans ma gloire
                Au roi je veux ouvrir mon c½ur.
                A toi l'honneur de ma victoire,
                L'amour nous promet le bonheur!

AÏDA            Eh quoi! tu braves la fureur
            La haine d'Amneris, haine terrible
                Comme la foudre, son courroux
            Va retomber sur mon père, sur nous!

RAD.    Je vous protégerai!

AÏDA                      Non! non! lutte impossible!
                Mais si tu m'aimes, nous aurons
        D'autre moyens plus sûr encor.

RAD.                                 Lesquels?

AÏDA                                          Fuyons!

RAD.   Qu'entends-je!…

AÏDA            Ah! viens! fuyons loin d'un désert stérile!
       Là-bas, mon doux pays nous offre un sûr asile.
            Là, parmi les bois tout en fleurs,
            Nous oublirons sans crainte,
            Dans une extase sainte,
            La terre et ses douleurs!

RAD. [avec transport]
              Sur la terre étrangère
              Il faudrait fuir tous deux!…
              Fuire l'Égypte si chère,
              Les temples de nos dieux!…
              Cette cité riante,
              Berceau de nos amours,
              De ma gloire naissante
              La quitter pour toujours!…

AÏDA        Viens! l'amour comblera les v½ux
              De nos âmes sincères!
              Dans d'autres sanctuaries,
              Servons les mêmes dieux.

        Fuyons!…

RAD. [hésitant]
                Chère Aïda!…

AÏDA                        Viens! ah! si tu m'aimais…

RAD.    Que dis-tu?

AÏDA               Non!

RAD.                  Quel mortel, quel dieux même
          Aima jamais de cet amour extrême…

AÏDA    Amneris à l'autel t'attend.

RAD.                               Non! non! jamais!

AÏDA       Jamais, dis-tu! dès lors à sa colère
              Tu me livres avec mon père!

RAD.    Oh! non! fuyons! c'est pour toi que je tremble…
                Au désert fuyons ensemble.
                C'est l'amour qui nous rassemble
                Et nous ouvre d'autres cieux!
                Nous aurons, ô ma maîtresse,
                Pour témoins de notre ivresse
                La nature enchanteresse
                Et les astres radieux!

AÏDA            Viens! suis-moi vers la contrée
                En tout temps de fleurs parée,
                Où notre âme est enivrée
                De parfums délicieux!
                Pour témoins de ma tendresse
                Nous aurons dans notre ivresse
                La nature enchanteresse
                Et les astres radieux.

TOUS DEUX       Viens! fuyons avant l'aurore
                Les dangers de cette cour;
                Viens! je t'aime, je t'adore…
                Notre guide, c'est l'amour!
                [Ils vont pour partir, Aïda s'arrête subitement.]

AÏDA            Mais, dis-moi, par quel chemin
        Pouvons-nous éviter les cohortes fidèles?

RAD.    Le chemin désigné pour frapper les rebelles
              Sera desert jusqu'à demain.

AÏDA             Et quelle est cette route?

RAD.    Le col de Napata.


                     Amonasro — Aida — Radamès.

AMON.              Di Nápata le gole!
        Ivi saranno i miei…

RAD.                        Oh! chi ci ascolta?…

AMON.   D'Aida il padre e degli Etiopi il Re.

RAD. [agitatissimo]
        Tu! Amonasro!… tu il Re? Numi! che dissi?
        No!… non è ver!… sogno… delirio è questo…                          5

AIDA    Ah no! ti calma… ascoltami,
        All'amor mio t'affida.

AMON.   A te l'amor d'Aida
        Un soglio innalzerà.

RAD.    Per te tradii la patria!                                          10
        Io son disonorato…

AMON.   No: tu non sei colpevole —
        Era voler del fato…
        Vieni: oltre il Nil ne attendono
        I prodi a noi devoti,                                             15
        Là del tuo core i voti
        Coronerà l'amor.

                   Les mêmes, Amonasro, paraissant.

AMON.                   Le col de Napata!
           Là vous verrez les miens!
RAD.                                Qui nous écoute?

AMON.                 Le père d'Aïda
        Et le roi d'Éthiopie.
RAD.                        Eh quoi! Qu'oses-tu dire!…
           Amonasro! toi!… toi! le roi!…
        Dieu! qu'ai-je dit! ce n'est pas vrai! c'est un délire…

AÏDA          Dans mon amour n'as-tu pas foi?

AMON.              Qu'Aïda t'appartienne!
AÏDA               Ma couronne est la tienne!
AMON.              Son amour t'a fait roi!

RAD.               O  honte ineffaçable!
                   Je livre mon pays!

AÏDA        Calme-toi!
AMON.                 Tu n'es pas coupable,
            Car Dieu lui-même l'a permis:
            Viens! mes amis sur l'autre bord
              M'attendent au passage.
              L'amour sur ce rivage
              Embellira ton sort!

              Amneris dal tempio, indi Ramfis, Sacerdoti,
                           Guardie e detti.

AMN.    Traditor!

AIDA             La mia rivale!…                                           5

AMON. [avventandosi ad Amneris con un pugnale]
        Vieni a strugger l'opra mia!
        Muori!…

RAD. [frapponendosi]  Arresta, insano!…

AMON.                                   Oh rabbia!

RAM.    Guardie, olá!

RAD. [ad Aida ed Amonasro]
                      Presto! fuggite!…

AMON. [trascinando Aida]
        Vieni, o figlia!

RAM. [alle Guardie]      Li inseguite!

RAD. [a Ramfis]  Sacerdote, io resto a te.                                10

    Les Mêmes, Amneris, puis Ramphis, les Prêtres, les Gardes.

AMON. [à Radamès]  Viens! viens!

AMN. [sortant du temple]        O traître!
AÏDA                                      Dieux! c'est elle!

AMON.   Ah! tu viens déjouer mes projets…
                      [S'approchant d'elle un poignard à la main]
                                         Meurs!

RAD. [le retenant]                             Rebelle!
           Arrête.
AMON.              O rage!

RAM.               Hôlà! gardes! holà!

RAD. [à Aïda et Amonasro]
           Courez! fuyez!…

AMON. [entraînant Aïda]
                           Viens, ô ma fille.
RAM. [au chef des gardes]                    Va!
        Cours vite!

RAD. [à Ramphis]  En ton pouvoir, ô prêtre, me voilà.

                            ATTO QUARTO

                            SCENA PRIMA

                     Sala nel Palazzo del Re.

  Alla sinistra una gran porta che mette alla sala sotterranea
   delle sentenze. — Andito a destra che conduce alla prigione
   di Radamès.

Amneris [mestamente atteggiata davanti la porta del sotterraneo].

        L'aborrita rivale a me sfuggia…
        Dei sacerdoti Radamès attende
        Dei traditor la pena. — Traditore
        Egli non è… Pur rivelò di guerra
        L'alto segreto… egli fuggir volea…                                 5
        Con lei fuggire… Traditori tutti!
        A morte! A morte!… Oh! che mai parlo? io l'amo…
        Io l'amo sempre… Disperato, insano
        È questo amor che la mia vita strugge.
        Oh! s'ei potesse amarmi!…                                         10
        Vorrei salvarlo.  E come?
        Si tenti!… Guardie: Radamès qui venga.

                           ACTE QUATRIÈME

                           SCÈNE PREMIÈRE

                 Une salle dans le palais du roi.

  A gauche, une galerie — Au fond, un vaste portique conduisant
    à la crypte où se rend les arrêts.  —  A droite,  galerie
    conduisant à la prison de Radamès.

                              Amneris.

            Ma rivale m'échappe, elle est sauvée.
        Les prêtres vont venir et Radamès attend
               La peine aux traîtres réservée.
               Un traître! il ne l'est pas. Pourtant
            Des secrets de l'État gardien infidèle,
               Il voulait fuir! fuir avec elle.
               Ah! pour tous ces traîtres, la mort!
        Ah! qu'ai-je dit! je l'aime, hélas! je l'aime encore!
            Pouvoir fatal! l'amour est le plus fort
                   Dans ce c½ur qu'il dévore!…
        S'il pouvait m'aimer!… je veux le sauver!… mais
        Comment! qu'il vienne! — Garde, amène Radamès.

            Radamès [condotto dalle Guardie]Amneris.

AMN.            Già i Sacerdoti adunansi
                Arbitri del tuo fato;
                Pur della accusa orribile
                Scolparti ancor ti è dato;
                Ti scolpa, e la tua grazia                                 5
                Io pregherò dal trono,
                E nunzia di perdono,
                Di vita, a te sarò.

RAD.            Di mie discolpe i giudici
                Mai non udran l'accento;                                  10
                Dinanzi ai Numi e agli uomini
                Nè vil, nè reo mi sento.
                Profferse il labbro incauto
                Fatal segreto, è vero,
                Ma puro il mio pensiero                                   15
                E l'onor mio restò.

AMN.            Salvati dunque e scolpati.

RAD.            No.

AMN.                Tu morrai.

RAD.                           La vita
                Abborro; d'ogni gaudio
                La fonte inaridita,                                       20
                Svanita ogni speranza,
                Sol bramo di morir.

AMN.            Morire!… ah!… tu dêi vivere!…
                Sì, all'amor mio vivrai;
                Per te le angosce orribili                                25
                Di morte già provai;
                T'amai… soffersi tanto…
                Vegliai le notti in pianto…
                E patria, e trono, e vita
                Tutto darei per te.                                       30

RAD.            Per essa anch'io la patria
                E l'onor mio tradiva…

AMN.            Di lei non più!…   

RAD.                             L'infamia
                Mi attende e vuoi che io viva?…
                Misero appien mi festi,                                   35
                Aida a me togliesti,
                Spenta l'hai forse… e in dono
                Offri la vita a me?

AMN.            Io… di sua morte origine!
                No!… vive Aida…

RAD.                            Vive!                                     40

AMN.            Nei disperati aneliti
                Dell'orde fuggitive
                Sol cadde il padre…

RAD.                                Ed ella?…

AMN.            Sparve, nè più novella
                S'ebbe…

RAD.                    Gli Dei l'adducano                                45
                Salva alle patrie mura,
                E ignori la sventura
                Di chi per le morrà!

AMN.            Or s'io ti salvo, giurami
                Che più non la vedrai…                                    50

RAD.            Nol posso!

AMN.                       A lei rinunzia
                Per sempre… e tu vivrai!…

RAD.            Nol posso!

AMN.                       Anco una volta:
                A lei rinunzia…

RAD.                            È vano…

AMN.            Morir vuoi dunque, insano?                                55

RAD.            Pronto a morir son già.

AMN.          Chi ti salva, o sciagurato,
              Dalla sorte che ti aspetta?
              In furore hai tu cangiato
              Un amor che ugual non ha.                                   60
              De' miei pianti la vendetta
              Ora il cielo compirà.                                      {*}

RAD.          È la morte un ben supremo
              Se per lei morir m'è dato;
              Nel subir l'estremo fato                                    65
              Gaudii immensi il core avrà;
              L'ira umana io più non temo,
              Temo sol la tua pietà.
                         [Radamès parte circondato dalle guardie]

AMN. [cade desolata su un sedile]
        Ohimè!… morir mi sento… Oh! chi lo salva?
        E in poter di costoro                                             70
        Io stessa lo gettai!… Ora, a te impreco,
        Atroce gelosia, che la sua morte
        E il lutto eterno del mio cor segnasti!
          [si volge e vede i Sacerdoti che attraversano la scena
            per entrare nel sotterraneo]
        Che veggo! Ecco i fatali,                                        {*}
        Gli inesorati ministri di morte!…                                 75
        Oh! ch'io non vegga quelle bianche larve!
                                   [si copra il volto colle mani]

SAC. [nel sotterraneo]
        Spirto del Nume sovra noi discendi!
        Ne avviva al raggio dell'eterna luce;
        Pel labbro nostro tua giustizia apprendi.

AMN.    Numi, pietà del mio straziato core…                               80
        Egli è innocente, lo salvate, o Numi!
        Disperato, tremendo è il mio dolore!
        [Radamès fra le guardie attraversa la scena e scende nel
          sotterraneo — Amneris, al vederlo mette un grido]              {*}

RAM. [nel sotterraneo]
        Radamès — Radamès: tu rivelasti                                  {*}
        Della patria i segreti allo straniero…

SAC.    Discolpati!

RAM.                 Egli tace…

TUTTI                           Traditor!                                 85

RAM.    Radamès, Radamès: tu disertasti
        Dal campo il dì che precedea la pugna.

SAC.    Discolpati!

RAM.                 Egli tace…

TUTTI                           Traditor!

RAM.    Radamès, Radamès: tua fè violasti,
        Alla patria spergiuro, al Re, all'onor.                           90

SAC.    Discolpati!

RAM.                 Egli tace…

TUTTI                           Traditor!
        Radamès, è deciso il tuo fato;
        Degli infami la morte tu avrai;
        Sotto l'ara del Nume sdegnato
        A te vivo fia schiuso l'avel.                                     95

AMN.    A lui vivo… la tomba… oh! gli infami!
        Nè di sangue son paghi giammai…
        E si chiaman ministri del ciel!
              [investendo i Sacerdoti che escono dal sotterraneo]
        Sacerdoti: compiste un delitto…
        Tigri infami di sangue assetate…                                 100
        Voi la terra ed i Numi oltraggiate…
        Voi punite chi colpa non ha.

SAC.    È traditor! morrà.

AMN. [a Ramfis]
        Sacerdote: quest'uomo che uccidi,
        Tu lo sai… da me un giorno fu amato…                             105
        L'anatema d'un core straziato
        Col suo sangue su te ricadrà!

SAC.    È traditor! morrà.            [si allontanano lentamente]

AMN.    Empia razza! anatema! su voi
        La vendetta del ciel scenderà!           [esce disperata]

                         AmnerisRadamès.
                Radamès paraît, amené par les gardes.

AMN.    Pour rendre ta sentence, on va bientôt t'entendre.
        Parle! et d'un si grand crime à toi de te défendre.
                Repousse tout soupçon,
                J'implorerai mon père,
                Je serai messagère
                De grâce et de pardon!

RAD.   Ne crois pas qu'on m'entende implorer leur clémence
       C'est le ciel que j'atteste, il sait mon innocence
                J'écarte avec horreur
                Tout ombre de parjure,
                Mon âme est toujours pure
                Et j'ai gardé l'honneur!

AMN.   Défends-toi donc! parle!

RAD.                          Non!

AMN.                              Tu mourras!

RAD.            Je hais la vie, et toute joie
       S'est tarie en mon c½ur à trop de maux en proie,
                     Je brave le trépas!

AMN.            Qu'entends-je! oh! non! tu vivras!
                  Tu vivras pour moi qui t'aime!
                Déjà de ton trépas mon c½ur
                  Souffrit l'angoisse extrême!
                  J'aime! fût-il douleur
                  Égale à ma souffrance.
                  Patrie! honneurs! puissance…
                J'aurais tout donné pour toi!

RAD.            Pour elle n'ai-je pas, moi,
                Dans l'ardeur qui m'enivre
        N'ai-je donc pas trahi l'honneur et mon pays?

AMN.            Ne parle pas d'elle!   

RAD.                                A moi le mépris
                  Et tu me dis de vivre!…
                  Mon Aïda chérie
                  Par toi me fut ravie!
                  Qu'as-tu fait de sa vie?
                  Peut-être… ô trahison…

AMN.            Toi! m'accuser de sa mort… non!…
                  Elle vit!…

RAD.                        Ah! vivante!…

AMN.              Dans la poursuite ardente
                  De nos soldats vainqueurs
                  Son père est mort!

RAD.                                Mais elle!…

AMN.            Elle s'enfuit! depuis, pas de nouvelles.

RAD.                La main des dieux sauveurs
        A protegé ses jours! que rien ne lui révèle
                    Que pour elle je meurs!

AMN.              Mais, si je te sauve, promets
        De ne plus la revoir!

RAD.                         Jamais!

AMN.                                A sa tendresse
                Renonce et tu vivras!…

RAD.                                 Jamais!

AMN.    Pour la dernière fois… tu l'oubliras!

RAD.                                      Jamais!…

AMN.                  C'est la mort qui se dresse!

RAD.                  Je l'attends sans frayeur.

AMN.            Qui pourra sauver ta tête
                Du supplice qui s'apprête;
                Cet amour qu l'on rejette
                Deviendra haine et fureur.

RAD.            Ah! combien la mort est belle,
                Si je dois mourir pour elle!
                Sans effroi mon c½ur l'appelle
                C'est ma joie et mon bonheur!

AMN.            Si tu lasses ma clémence
                Je te livre à leur fureur!

RAD.            Ah! je brave ta vengeance,
                Ta pitié me fait horreur!…
                             [Radamès sort au milieu des gardes.]
AMN.    Ah! je me sens mourir! comment sauver sa vie?
          Et j'ai pu le livrer à ces juges cruels:
          Ah! sois maudite atroce jalousie!
          Hélas! sa mort de regrets éternels
                   Pour moi sera suivie.            [Les prêtres
            traversent la galerie pour descendre dans la crypte.]
        Ah! voilà du trépas les terribles ministres!
        Ah! loin de moi, fuyez spectres sinistres!
        Et c'est moi qui le livre à ces juges cruels!…

LES PRÊTRES  Dieu tout-puissant, que ta foi nous éclaire!
        Fais éclater ta divine lumière
        Et par nos voix que parle un Dieu sévère!  [Ils passent.]
                                                 
AMN.                Pitié, grands dieux!
                    Pour ma souffrance,
                    Qu'à tous les yeux
                Brille son innocence!…
        Ah! je succombe à ma douleur immense!
   [Radamès, entouré de gardes, suit les prêtres dans la crypte.]
           Comment le sauver! triste sort!…
           En moi je sens la froide mort!…
                   [On entend la voix de Ramphis dans la crypte.]
RAM.    Radamès, tu livras à l'étranger impie,
              Les secrets de notre patrie,
              Disculpe-toi!
PRÊ.                       Disculpe-toi!

RAM.    Il se tait! c'est un traitre.

AMN                                  O dieux! en vous j'ai foi!…
                 Pitié pour lui! pitié pour moi!…

RAM.    Radamès! Radamès! tu désertas l'armée
           Lorsque la guerre allait être allumée,
              Disculpe-toi!
PRÊ.                       Disculpe-toi!

RAM.    Il se tait! c'est un traitre.

AMN                                  O ciel! exauce-moi!
                 Pitié pour lui! pitié pour moi!…
RAM.    Radamès!… tu trahis dans ta lâche infamie
                L'honneur et al patrie…
              Disculpe-toi!
PRÊ.                       Disculpe-toi!

RAM.    Il se tait! c'est un traitre.

AMN                                  O dieux! je meurs d'effroi.
                 Pitié pour lui! pitié pour moi!…

PRÊ.      A ton sort rien ne peut te soustraire,
          Que l'Egypte et le ciel soient vengés!…
          Sois vivant englouti dans la terre
          Sous l'autel de nos dieux outragés!…

AMN.      Lui vivant! le tombeau!… Quoi!… ces prêtres…
          C'est du sang qu'il leur faut… justes dieux!…
          Voilà donc les ministres des cieux!…
                 [Les prêtres reparaissent sortant de la crypte.]
RAM.        Mort aux traitres!…

AMN.      Quel forfait!… quelle aveugle colère!
          Etes-vous altérés de son sang:
          Outrageant et le ciel et la terre,
          Votre arrêt a frappé l'innocent.

RAM.        C'est un traitre!… il mourra!…

AMN.      L'immoler! quand tu sais que je l'aime,
          Que mon c½ur à jamais l'aimera!…
          De ce c½ur déchiré l'anathème
              Sur vous tous tombera

RAM.          C'est un traitre!… il mourra!…

AMN     Pitié pour lui!
RAM.                  La mort! c'est un traitre! il mourra!
                            [Ramphis et les prêtres s'éloignent.]
AMN.      Race impie!… anathème sur vous!
          Ah! soyez écrasés par le ciel en courroux!
                                       [Amneris sort désesperée.]

                            SCENA SECONDA

                    La scena è divisa in due piani.

 Il piano superiore rappresenta l'interno del tempio di Vulcano
  splendente d'oro e di luce: il piano inferiore un sotterraneo.
  Lunghe file d'arcate si perdono nell'oscurità. Statue colossali
  d'Osiride colle mani incrociate sostengono i pilastri della
  vôlta.

    Radamès è nel sotterraneo sui gradini della scala, per cui è
     disceso —  Al di sopra, due Sacerdoti intenti a chiudere la
     pietra del sotterraneo.

RAD.    La fatal pietra sovra me si chiuse…
        Ecco la tomba mia. — Del dì la luce
        Più non vedrò… Non rivedrò più Aida…
        — Aida, ove sei tu? Possa tu almeno
        Viver felice e la mia sorte orrenda                                5
        Sempre ignorar! — Qual gemito!… Una larva…
        Una vision… No! forma umana è questa…
        Cielo!… Aida!

AIDA                  Son io…

RAD.                          Tu… in questa tomba!

AIDA    Presago il core della tua condanna,                               10
        In questa tomba che per te s'apriva
        Io penetrai furtiva…
        E qui lontana da ogni umano sguardo
        Nelle tue braccia desiai morire.

RAD.    Morir! sì pura e bella!                                           15
        Morir per me d'amore…
        Degli anni tuoi nel fiore
        Fuggir la vita!
        T'avea il cielo per l'amor creata,
        Ed io t'uccido per averti amata!                                  20
        No, non morrai!
        Troppo io t'amai!…
        Troppo sei bella!

AIDA [vaneggiando]  Vedi?… di morte l'angelo
        Radiante a noi si appressa…                                       25
        Ne adduce a eterni gaudii
        Sovra i suoi vanni d'ôr.
        Su noi già il ciel dischiudesi…                                  {*}
        Ivi ogni affanno cessa…
        Ivi comincia l'estasi                                             30
        D'un immortale amor.

           Canti e danze delle Sacerdotesse nel Tempio.                  {*}

AIDA    Triste canto!…

RAD.                   Il tripudio
        Dei Sacerdoti…

AIDA                   Il nostro inno di morte…

RAD. [cercando di smuovere la pietra del sotterraneo]
        Nè le mie forti braccia
        Smuovere ti potranno, o fatal pietra!                             35

AIDA    Invan!… tutto è finito
        Sulla terra per noi…

RAD. [con desolata rassegnazione]
        È vero! è vero!…
                              [si avvicina ad Aida e la sorregge]

AIDA – RAD.  O terra, addio; addio valle di pianti…
        Sogno di gaudio che in dolor svanì…                               40
        A noi si schiude il cielo e l'alme erranti
        Volano al raggio dell'eterno dì.

                    [Aida cade dolcemente far le braccie di Rad.]

AMN. [in abito di lutto apparisce nel tempio e va a prostrarsi
                          sulla pietra che chiude il sotterraneo]
        Pace, t'imploro — salma adorata…
        Isi placata — ti schiuda il ciel!
                           DEUXIÈME TABLEAU

                 La scène est divisée en deux parties.

     La partie supérieure représente l'intérieur du temple de
        Vulcan resplendissant d'or et de lumières.  La partie
        inférieur représente une scrypte; de longues files de
        piliers taillés dans e roc se perdentdans l'obscurité.

                  Radamès, dans la crypte; Aïda
   Il est sur les degrés de l'escalier par lequel il est descendu.
     Au-dessus deux prêtres scellent la pierre qui ferme l'entrée
     du souterrain.

RAD.       J'entends sur moi le marbre qui retombe
                 Oui, c'est ici ma tombe.
               Je ne dois plus revoir les cieux,
        Je ne dois plus te voir, Aïda!… toi, si chère…
        Où donc es-tu? sois donc heureuse sur la terre,
        Ignore au moins quel fut mon sort affreux.    [Il entend
      un soupir et distingue un forme indécise dans l'obscurité.]
        Mais qu'entends-je? Est-ce un spectre, un fantôme? je croi
        Que c'est un être humain… Ciel! Aïda!…

AÏDA                                         C'est moi…

RAD.       Dans ce sépulcre!… toi!…

AÏDA                               J'avais d'avance
               Deviné leur sentence,
          Dans ce tombeau pour toi prêt à s'ouvrir
          J'ai pénétré furtive, et sous la voûte
               Où nul ne nous écoute
          Auprès de toi, la mort sera douce!

RAD.                                        Mourir!
                Mourir! ô toi si belle!……
               Mourir! ô loi cruelle……
        Quand pour toi l'existence à peine s'ouvre-t-elle!
           Quand l'amour doit charmer ton c½ur!
                Dans mon malheur
                Quoi! tu devrais me suivre!
         Non! tu vivras… car, moi, je t'aime… tu dois vivre.

AÏDA      Vois! déjà l'ange de la mort
              A déployé son aile,
              De la vie éternelle
              Il nous montre le port.
          Pour nous s'est entr'ouvert le ciel,
              Là, toute la douleur cesse,
              Là, commence l'ivresse
              De l'amour éternel!
          [On entend le chant des prêtres réunis dans le temple.]

AÏDA    Quel chant lugubre!…

RAD.                       C'est le chant du sanctuaire…

AÏDA             C'est notre hymne de mort?…

RAD.    Ne puis-je soulever cette fatale pierre
                Et nous délivrer!…

AÏDA                              Vain effort!
          Il n'est pour nous nul espoir dans ce monde…

LES PRÊTRES  Ma voix t'implore, ô toi source féconde!…

AÏDA                  C'est la mort!

RAD.                                C'est la mort!…

AÏDA — RAD. Adieu, séjour de deuil et de misère,
          Rêve joyeux, triste réalité!
          Le ciel pour nous s'entr'ouvre, et l'âme fière
          Va s'envoler vers l'immortalité.

AMN.  [Elle paraît dans le temple, vêtue de deuil et va se
             prosterner devant la pierre qui ferme le souterrain]
          Ame adorée… Isis la bonne mère
             T'ouvre le ciel! repose en paix!
                     Toi que j'aimais
                     Repose en paix!


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2 Jan 2010